C’est une histoire intéressante que vous voulez ? alors je vous conseille d’aller voir ailleurs, parce que c’est pas celle-là qui risque de vous intéresser. Comme beaucoup d’autres gens ici, j’imagine en tous cas, je suis né dans un ghetto. Et avant même que j’aie pu développer un semblant de cerveau, je n’appartenais déjà plus à ce monde. Ou enfin, j’y appartenais, pour des raisons autres qu’humaines. Quoi qu’il en soit, j’appartenais plus à moi-même. Ouais, t’as bien deviné mon pote, je suis un candidat de l’expérience moi aussi. Mon groupe, c’est les endo. donc en gros, mon but dans la vie à moi, ça serait d’être sans émotion. Un vrai connard, un dur de dur. Mais laissez-moi vous dire une chose ; c’est raté. De A à Z. y’a eu une erreur de conception, quelque part, mais cette merde a vraiment pas fonctionné. Et avec tout ça, on essaie constamment de me mettre sur une échelle de dix degrés, mais je crois pas que personne n’y soit arrivé. Enfin, encore là, peut-être que c’est juste moi ; j’suis pas un scientifique. Loin de là, d’ailleurs. On dit de moi que je suis instable. Qu’il ne faut pas s’étonner si j’essaie de te foutre mon poing à la gueule une seconde et que celle d’après, je vis une crise existentielle. On inscrit aussi à mon dossier que j’ai des pratiques dangereuses. Possiblement sexuelles. Sur ce point-là, je vous dirai que je ne vois pas de quoi on parle ; mais je ne vis pas la sexualité des autres, alors qui sait ce que ça veut dire, des pratiques sexuelles dangereuses ?

Passé ce stade-là, je vais vous en dire un peu plus sur ma jeunesse. Je suis né en corée, évidemment. Après mes premières injections et l’approbation du projet Nemesis, ma famille reçut l’argent et le confort dont ils eurent besoin. Une grande baraque, bien des gadgets et beaucoup de trucs que seuls les riches peuvent se permettre. Mais moi, j’avais pas droit à ces choses-là. À la base, j’étais censé avoir une éducation très sévère ; on m’enlèverait le droit aux plaisirs les plus normaux et ainsi de suite, vous connaissez le discours. Mais ça ne s’est pas passé exactement comme ça. Mes parents voulaient le cash, rien de plus. À partir de mes quinze ans, cap vers les états-unis ; va savoir pourquoi, j’ai jamais pensé à demander et je m’en fichais, en fait. Je pense surtout que c’était une question d’honneur ou je sais pas quoi. On m’a laissé seul à l’aéroport et à partir de ce moment-là, je les ai plus jamais revus. Donc, j’imagine que c’était un moyen de se débarrasser de moi sans passer pour des salauds. Heureusement, c’était l’été. Tout ce que je peux vous dire c’est que je me suis débrouillé comme possible, jusqu’à ce que l’hiver arrive et qu’une âme charitable m’héberge. Oh c’était pas du gros luxe. Et c’était pas chaleureux non plus d’avoir des pauvres cons au derrière tous les jours qui venaient me chercher pour une piqûre – franchement, elle était bien chiante, mais je préférais quand c’était ma génitrice qui le faisait elle-même. Sur ce, c’est assez dit. Le reste, je le garde à moi. Y’a bien des limites à tout dire. Ça serait trop facile, sinon.