Il y a bien des événements qui peuvent perturber une vie. Il y a bien des choses qui peuvent changer une histoire. Un petit rien peu faire basculer une existence entière. Un petit rien comme un homme et une femme qui se laissent tenter par le plaisir charnel et qui goûtent au bien-être extrême. Ils sont là, à s'unir contre le monde, oubliant leur situation. Mais c'est seulement quelques mois plus tard qu'ils comprennent leur erreur. La goutte d'eau qui fait déborder le vase, la goutte d'eau de trop. Monsieur et madame Byeol disposent déjà de trois enfants et d'un revenu beaucoup trop bas pour un quatrième. Sauf qu'ils y pensent qu'une fois à l'hôpital, dans cette pièce étrange et blanche. La femme est allongée sur un siège, les jambes écartées et le souffle court. Elle pousse, elle pleures, elle prie. Que dieu l'épargne, que dieu ne la fasse pas souffrir, elle et sa famille. Un autre bébé, des frais en plus et l'argent qui n'entre pas davantage. Le père n'est pas mieux, il préfère s'inquiéter pour sa femme et son fils, avant de penser aux restes. Mais ceux-ci les rattrapent bien malgré lui, malgré eux. Ils n'ont rien de plus pour nourrir une énième bouche et tout deux voient déjà le calvaire, l'enfer qu'ils vont vivre pour le bonheur de leurs enfants, de leurs chaires. « Ne pleures pas mon ange, on trouvera une solution. » Chuchotait l'homme à l'oreille de sa femme pour la rassurer, tandis qu'elle continuait de fondre en larme. Les cris du bébé la rendait encore plus mal, plus fragile. Jamais ils ne pourraient l'élever correctement comme les précédents, déjà bien mal par ce manque de moyen. Mais dans le malheur, il y a toujours une lueur d'espoir. Les mots de l'homme ne tombèrent pas dans l'oreille d'un sourd, faut croire. Dieu les regarde et leur accorde une chance. Il suffit d'un accord, d'un peu d'encre et tout change. Une promesse, un contrat et voila la famille Byeol sortit du pétrin. Du moins, ils le pensent ainsi, mais ils ne réalisent pas l'avenir du petit dernier. Ginger est condamné à une vie misérable entre injection et éducation strict.

Depuis son plus jeune âge, le petit dernier des Byeol n'a jamais été très facile à discipliner et à cerner. Une vraie tête brûlée. Il n'écoutait que lui, son instinct, mais aussi son coeur et ses envies. Quand papa le disputait pour qu'il travaille, lui préférait fuguer et les rendre barge. Le mouton noir, comme disait l'aîné des quatre en voyant sa mère triste et désemparée. Une teigne qui se fiche pas mal du monde, qui fait une crise à chaque injection et qui déteste toujours plus ses parents. Pourquoi lui faire cela ? Pourquoi le forcer à rester enfermer dans sa chambre pour étudier, toujours étudier ? Il en a passer des bouquins de cours, rarement de son niveau. Ils voulaient toujours plus, alors ils lui imposaient toujours plus. Pour un gamin de primaire, il connaissait déjà le programme d'un collégien. Toujours plus, beaucoup plus. Ginger était une éponge à connaissance. Sa chambre était vide d'occupation, on lui retirait son ordinateur et son portable avant de verrouiller sa porte à double tour. « sois fort, mon enfant. » Qu'ils disaient pour l'encourager, lui imposant toujours plus de livre et d'exercice. à l'âge de dix ans, Ginger connaissait beaucoup plus de chose qu'un adulte de quarante ans. Son cerveau était bourré, aussi pleins qu'une carte mémoire. Ce gosse ne semblait pas mieux que son ordinateur lui-même, un google sur patte. Une question ? Une réponse. Parfois même, il faisait les deux. Une sorte de "je me demande, mais je sais". à la longue, Ginger a prit l'habitude d'être traité comme un robot, comme une machine, mais par moment, il avait ce besoin de liberté. Quand l'occasion se présentait, il fuyait. Le gamin abandonnait les idéaux de ses parents pour fuir cette vie trop parfaite. Une belle maison, de la nourriture, des beaux vêtements. Un luxe qui l'étouffe, qui le répugne. Il préférait tellement mieux se réfugier chez des amis pauvres, modestes ou quasiment ignorés de la société. C'était cette vie là qu'il adorait, cette vie de rebelle, d'infidèle.

Sauf que bien des choses vous rattrapent avec le temps. Si au départ s'était bien facile de partir, à la suite, ce fut bien difficile. Ses parents redoublèrent de moyen pour le tenir en laisse, pour lui éviter bien des peines. Au final, son ordinateur et ses bouquins furent ses seuls amis. Il n'avait ni droit au réseaux sociaux, ni aux jeux vidéos amusant ou violent. Des consoles ? Ils lui accordèrent, mais seulement pour des jeux stratégiques et éducatifs. Après, il devait faire ami-ami avec les échecs, les dames ou des casses-têtes divers. Ginger n'aimait et n'aime toujours pas sa vie. Les injections fréquentes le rendaient fou et il s'énervait à chaque fois. Ses frères devaient le tenir pour aider ses parents, subissant ainsi la haine du cadet. Puis un jour, cette vie changea. Son existence dégringola et ce qu'il pensait être une famille, l'abandonna. Il vit le visage en larme de sa mère, celui dur de son père et l'incompréhension de ses frères. Pourquoi ? Aucune idée.... Du moins, jusqu'à terminé là-bas. Le tempérament teigneux et invivable de Ginger ne l'aidait pas, bien au contraire. Il vivait un enfer, un désastre. Même aujourd'hui, rien ne va. Sa mémoire lui fait défaut, ses connaissances le trahissent. Par moment il oublie sa famille, ses amis. Quand cela arrive, il se sent mal, tellement mal qu'il déprime. Une crise. Un simple dérangement et il s'énerve, il rage, limite s'il pleures. ça ne va pas dans sa tête, ça ne va vraiment pas dans sa vie. Même le sommeil le délaisse, insomniaque dans l'âme. Pourtant, dans le fond, Ginger n'est pas si mauvais, si méchant. Au contraire, Ginger est doux, gentil. Il sourit souvent pour rien, il rit pour rien, il parle pour rien. Ginger est un ensemble de petite chose qui font de lui un rien, mais aussi un tout. Une personne particulière, lunatique, mais adorable et attachante. Il voudra aider son prochain, même si parfois, il ne s'en souvent pas. Ce sera son éternel défaut, ses souvenirs, sa mémoire. Elle devient erronée de jour en jour, plus mauvaise de minute en minute, d'heure en heure.